dimanche 22 juillet 2012

Le cri de la carpe.



Pour ceux qui découvre la lecture, je vous invite à lire le début.




Je suis muet depuis que ma mère est décédée, il y a de ça 20 ans. Son nom était HOPEN Mathilde. Je l’aimais et je l’admirais. C’était une femme à caractère, elle imposait sa voix quand elle n’était pas d’accord. Mais elle respectait les avis des autres. Elle est morte dans un accident, percutée par une voiture alors qu’elle traversait la rue. J’étais avec elle, on se baladait en ville pour voir les cadeaux de noël. Quand c’est arrivé, elle était au téléphone avec mon grand père. Elle avait l’habitude de me tenir la main pour ne pas me perdre. Mais ce jour là, elle ne pouvait pas à la fois répondre au téléphone et tenir les achats, il lui aurait fallut trois mains. Arrivé au boulevard central, elle ne s’est pas arrêtée au feu, continuant à traverser vers l’autre trottoir. Malheureusement, le feu piéton était rouge. Moi, derrière, je disais à ma mère de se stopper, mais elle ne m’entendait pas. Je ne l’ai pas suivi, je n’ai pas couru à ses jupons pour lui dire de revenir. J’aurais pu, aurais-je dû ? Il y eut alors un crissement de pneus, j’ai commencé à crier à ma mère de revenir, elle se tourna vers la voiture, puis une fraction de seconde après, vers moi. Son visage n’était plus le même que d’habitude, ses yeux me suppliait, comme pour me demander pardon. J’ai continué à crier jusqu’à ce que le corps de ma mère retombe sur le sol, recouvert de sang, complètement déformé par le choc. Mais plus je criais et moins ma voix se faisait entendre. Je n’arrivais plus à crier, plus aucun son ne sortait de ma bouche.
Que dire de mon père ? Le 17 décembre 1985, ma mère a reçu deux nouvelles, une bonne et une mauvaise. La bonne étant qu’elle était enceinte, la mauvaise étant que mon père était mort. « CAPORAL CHOBAN Matthias, tombé sur le champ de bataille » lui ont-ils dit. Je n’ai vu mon père que sur des photos, ou même des vidéos. Ma mère n’a jamais réussi à m’en parler, dès qu’elle essayait, elle se mettait à pleurer à grosse goute. C’était donc un sujet que j’ai appris à éviter. Je regrette de ne pas avoir persévéré, maintenant que ma mère est morte. Je sais juste qu’il était militaire, envoyé en Alsace, mort sur le coup lors d’un entrainement. Une erreur de distribution de munitions parait-il, les militaires ont eut des balles réelles au lieu de balle à blanc : un vrai massacre.
Je fus recueilli par mes grands parents maternels, Denis et Madeleine HOPEN. Oui… je porte le nom de ma mère. Mes grands parents sont des gens incroyables, ils vivent le jour pour le jour, ils ont toujours été là pour moi, et le sont toujours, se souciant du moindre détail. Ils se comportent comme de vrais parents.
J’ai du apprendre, à 6 ans, le langage des signes afin de pouvoir communiquer avec les autres. Evidement, seul ceux qui le comprenait pouvait discuter avec moi. J’ai donc été placé dans une école spécialisée. Au début, c’était difficile pour moi, parce que j’avais tendance à vouloir parler. Puis j’ai appris à mêlé mes gestes à mes lèvres, ca me donne l’impression de parler même si je sais très bien qu’aucun son ne sort de ma gorge. Mes études ont étés laborieuses, je me suis arrêté au BAC, renfermé sur moi-même, je ne parlais à personne d’autre que mes amis. Justement mon boulot, je le dois à un ami, ingénieur en informatique, spécialisé dans les jeux vidéo. Cet ami, c’est Benoit, il m’a initié aux jeux depuis mon adolescence, il m’a sorti de tous mes problèmes informatiques. Et c’est lui qui m’a pistonné pour un travail : testeur de jeux vidéo.
            J’emballe l’appareil photo dans du papier cadeau de noël dernier et je le décor d’un petit nœud rouge. Je me dirige vers la cuisine, sort un paquet de gâteau, du jus de fruit, et j’appuie sur le bouton de la télécommande. Il est 16h00.

samedi 21 juillet 2012

Le cri de la carpe.


Pour ceux qui découvre la lecture, je vous invite à lire le début.





Depuis mon adolescence, je passe des heures à jouer sur l’ordinateur, 1 heure, ou plus de 5 heures. Il y a pas mal de critiques sur les jeux vidéo, surtout depuis qu’un jeune coréen est mort devant son écran après avoir joué plus de 40 heures. Mais ce n’est pas le jeu qui tue : c’est le manque de sommeil, ajoutez à cela une malnutrition ou plutôt la non nutrition, et le joueur ne tarde pas à se tuer. On pourrait presque appeler ça un suicide involontaire. Je n’ai jamais réussi à comprendre comment l’envie de jouer surpassait l’envie de manger. L’addiction aux jeux vidéo est un sujet de polémique, et il ne fait que grandir. Pour ma part, le jeu fait parti de moi, c’est ma passion mais aussi mon boulot. Je travail pour une compagnie de testeur de jeux.
J’éteins l’ordinateur, il est 15h26. A peine sorti de la douche, quelqu’un sonne à la porte. C’est le facteur avec un recommandé à mon nom, je le signe, salut le facteur d’un geste et referme la porte. Je savais ce que contenait le colis, et il était temps qu’il arrive. J’avais commandé un appareil photo sur internet, un Sony le CanonAlpha 700. Léa est photographe amateur, elle photographie tout et n’importe quoi, ca fait partie de son charme. Elle veut en faire son métier, pour elle, il n’y a rien de plus beau que la photographie, elle me dit toujours que le temps passe trop vite, et qu’avec ses photos, elle le fige. Bien sur, je suis d’accord avec elle, mais le temps continu malgré tout à passer. Pour moi, la photographie fige le présent pour que le futur se souvienne du passé.
Pendant que je contemple le cadeau, le téléphone fixe sonne, il doit s’agir d’une publicité. Je ne décroche pas, le répondeur se met en route, la voix de Léa retenti du message préenregistré : « Bonjour, vous êtes bien chez LEROY Léa et HOPEN Sébastien, nous ne sommes pas là ! Mais vous pouvez laisser un message. ». Après le signal sonore, une voix masculine retenti, c’est mon nouveau conseillé bancaire qui souhaite me rencontrer pour la première fois, il me demande de le rappeler au plus vite. J’émets un léger soupir.
La sonnerie de la porte retentie une nouvelle fois, j’ouvre à une charmante personne. Une femme d’une trentaine d’année, grande, 1m70 sans doute, élancée, elle ne doit pas peser plus de 60 kilos. Ces cheveux châtains descendent le long de ses épaules jusqu’à sa poitrine Le silence me fait revenir vers son visage, ces yeux noisette me regardent. Elle me sourit et engage la conversation : « Bonjour monsieur, je suis votre nouvelle voisine, Christine LAFONT, je voulais juste vous dire que ce soir, nous faisons la crémaillère, et que nous risquons de faire un peu de bruit. ». Je me souviens en effet que Léa m’a dit qu’un couple venait d’emménager dans l’appart d’à coté. Je lui fais signe avec mon pouce pour lui dire que j’ai compris. Elle me regarde fixement. Deux secondes après, son regard change, ses sourcils se fronce, elle affiche maintenant un visage inquiet. Elle me demande maladroitement : « Tu…Je veux dire…Vous êtes muet ? ». Je bouge la tête de haut en bas. Elle continu, embarrassée : « Ha, excusez moi, je ne savais pas. ». Je souris pour lui faire comprendre que ce n’est pas grave. Elle tourne les talons, je ferme la porte derrière elle. Je soupir une seconde fois. En effet, je suis muet.

Pour ceux qui découvre la lecture:
Et une suite!

Le cri de la carpe.



« Je suis mort ! ». C’est la dernière pensée qui m’est venu à l’esprit alors que je regardais la voiture arriver à hauteur de mes genoux. Je serais probablement projeté à une hauteur phénoménale et mon corps retomberait quelque part dans la rue, sous les yeux écarquillés des témoins. Ca ne tarda pas, il y eut un gros choc, mon corps fit des figures dignes des plus grands trapézistes, et retomba lourdement sur le sol. Alors que les témoins de la scène se rassemblaient autour de moi, dans de grands chuchotements, j’ai compris que j’étais acteur de ce théâtre, comme une caméra au dessus de l’accident. Parmi les témoins, il y avait Léa, dans tous ses états. Elle hurlait et pleurait au dessus de moi, tout en me prenant la main droite. J’entendais difficilement ses mots, puisque j’étais au dessus d’elle. Au loin, les sirènes des pompiers se faisaient entendre. D’ailleurs, elles ressemblaient étrangement à l’alarme de mon réveil.
« Encore ce fichu cauchemar » me dis-je dans ma tête tout en me redressant du lit. Cela fait maintenant plusieurs mois que je fais ce cauchemar. Néanmoins, la dernière fois, ce n’était pas moi qui me faisais percuter par la voiture. A coté de moi, Léa émet un léger ronchonnement pour me faire comprendre que le réveil sonne toujours. Je l’éteins, j’embrasse Léa sur le front, et sort rapidement du lit.
Léa, c’est ma copine, ou devrais-je dire ma petit copine. Nous ne sommes ni marié, ni fiancé, juste pacsé, sans enfant. C’est le genre de fille que j’adore : elle a un corps de femme. Rien à voir avec ces tops modèles masculinisés, dandinant leurs fesses plates en étant habillés de vêtements ringards. Le corps de Léa forme un sablier : ses seins sont assez gros pour tenir dans la paume de mes mains, ses hanches rendraient jalouse les femmes qui suivent un régime pour rentrer dans leur maillot d’été, et enfin ses fesses sont rondes et fermes. Elle mesure 1m75, brune aux cheveux mi-long, toujours le sourire aux lèvres. Ce que j’aime aussi chez elle, c’est sa façon de se maquiller : elle arrive à faire ressortir ses yeux d’un bleu éclatant, simplement en mettant du phare à paupière noir. Mais ce n’est pas que pour son physique que je suis avec elle ; Léa est cultivée, mais surtout généreuse, sensuelle. La sensualité est la quintessence de la féminité. Elle m'émerveille, ses gestes suspendent le temps,  elle attire l'attention et elle inspire le respect. Je l’aime.
« Pourquoi tu te lèves? » me demande-t-elle. Je regarde mon portable, celui-ci indique samedi 7 Aout, et il est 6h07…  Je me remets dans le lit, embrasse de nouveau ma tendre sur le front. « Tu abuses mon chéri… » me souffle-t-elle avant que je me rendorme.
Le chéri, il se prénomme Sébastien HOPEN et il s’agit de moi. Un gars de 26 ans qui était près à partir au boulot un week-end. Pas n’importe quel week-end, c’est le jour de ma rencontre avec Léa. Rien de bien extraordinaire, c’était lors d’un festival de musique, elle a juste vomis sur ma chemise. Elle s’était mise en tête de me la retirer, la déboutonnant maladroitement. Après m’être changé, elle me jura de laver ma chemise et de me la rapporter. Elle paraissait tellement navrée. C’est ainsi qu’on se rencontra une nouvelle fois, et au fils du temps, on a appris à se connaître, et à s’aimer.
Il est 11h21, il faut se lever. A cette heure là, le petit déjeuner deviens le déjeuner, c’est souvent le cas le week-end. Léa me rejoins, elle est déjà prête, douchée et habillée dans une robe bleu avec des fleurs exotiques rouges, blanches, jaunes ; un peu comme les chemises Hawaïennes. Elle est splendide. Elle m’embrasse, se verse une tasse de thé à la framboise, et me dis : « Je vais faire du shopping cet après midi, n’oublie pas notre rendez-vous ce soir. ». Je lui fais signe que non. Je me rappelle très bien que l’on va au Transbordeur pour fêter nos 3 ans de relation. Je pense tout de suite au film « L’Amour ne dure que 3 ans », je souris et je me resserre un café. Comment peut-on aimer une personne que 3 ans ? Ce n’est plus de l’amour, mais une sorte de désire mutuelle qui disparaît au fil du temps. Le film aurait du s’appeler : « Le désir non partagé ne dure que 3 ans ». Au son de la porte qui se ferme, je compris que ca fais un moment que je rêvasse. Léa est partie. J’allume le PC, comme à mon habitude. Il est 12h14, notre rendez-vous est à 20h, j’ai le temps.